La résistance aux antibiotiques chez les animaux de compagnie devient un sujet d'inquiétude croissant pour les experts vétérinaires. Les chats et les chiens ont reçu 10% d'antibiotiques de plus en 2021 qu'en 2020 selon l'ANSES. Cette augmentation significative s'inscrit dans une tendance préoccupante qui mérite l'attention de tous les propriétaires d'animaux.
Depuis 2011, l'exposition globale des animaux aux antibiotiques a diminué de 45,4%. Cependant, cette tendance s'est inversée récemment. Entre 2019 et 2020, l'exposition aux antibiotiques a augmenté de 5,1% pour les chats et les chiens, tandis que le chiffre d'affaires des médicaments destinés à ces animaux a connu une hausse de 8,6%. Selon les experts, cette médicalisation plus importante des animaux de compagnie pourrait contribuer au développement de bactéries résistantes, créant ainsi un risque pour la santé animale et humaine.
Points clés
La résistance aux antibiotiques chez les animaux de compagnie devient une menace croissante qui nécessite une action immédiate de tous les propriétaires.
• L'exposition aux antibiotiques chez les chats et chiens a augmenté de 5,1% entre 2019 et 2020, inversant une tendance de baisse observée depuis 2011.
• Les bactéries résistantes circulent constamment entre humains, animaux et environnement - votre animal peut être porteur sain sans symptômes pendant des mois.
• Plus de 40% des souches bactériennes chez les chats résistent désormais à l'amoxicilline, contre 30% en 2018, créant des impasses thérapeutiques.
• Respectez scrupuleusement les prescriptions vétérinaires et maintenez une hygiène rigoureuse après contact avec votre animal pour limiter la transmission.
• La vaccination préventive et des conditions de vie saines renforcent l'immunité naturelle, réduisant le besoin d'antibiotiques chez votre compagnon.
Cette problématique s'inscrit dans l'approche "Une seule santé" où la protection de nos animaux contribue directement à préserver l'efficacité des antibiotiques pour tous.
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Comprendre la résistance aux antibiotiques chez les animaux de compagnie
L'antibiorésistance se définit comme la faculté des bactéries à résister aux effets des antibiotiques, rendant ces médicaments inefficaces contre les infections. Ce phénomène, qui prend une ampleur considérable, menace autant les humains que les animaux de compagnie.
Différence entre bactérie résistante et animal porteur
Une seule prise d'antibiotique suffit pour sélectionner des bactéries résistantes dans nos microbiotes. Un animal peut ainsi devenir "porteur" d'une bactérie résistante sans présenter de symptômes [1]. Cette distinction est essentielle : être porteur ne signifie pas être malade, mais constitue néanmoins un risque potentiel de transmission. En effet, ces bactéries circulent constamment entre humains, animaux et environnement [1]. Ainsi, un chat ou un chien peut être porteur sain tout en disséminant ces bactéries résistantes dans son entourage pendant plusieurs mois [2].
Pourquoi les chats et chiens sont concernés
Depuis 2018, la tendance s'est inversée chez les animaux de compagnie : le taux de résistance aux antibiotiques a augmenté légèrement chez les chiens et les chats [3]. Cette situation s'explique notamment par l'utilisation excessive ou inappropriée d'antibiotiques en médecine vétérinaire [4]. En 2020, sur 51 736 antibiogrammes collectés par les laboratoires d'analyse, 27,3% concernaient des chiens et 10,8% des chats [5].
L'augmentation de la résistance est particulièrement marquée pour certains antibiotiques courants : le taux de souches résistantes à l'amoxicilline chez les chats, qui était de 30% en 2018, est passé à plus de 40% en 2020 [5]. Par ailleurs, le suivi porte principalement sur la bactérie Escherichia coli, considérée comme un indicateur fiable de l'évolution de l'antibiorésistance car elle constitue un réservoir connu de gènes de résistance [5].
Notion de multirésistance bactérienne
La multirésistance représente un niveau de menace plus élevé. Une bactérie est considérée comme multirésistante lorsqu'elle est insensible à plus de trois antibiotiques testés [5]. Ce phénomène remet fondamentalement en cause l'efficacité des traitements disponibles [3]. Dans certaines situations alarmantes, plus aucun antibiotique n'est efficace contre une bactérie, conduisant à des impasses thérapeutiques [6].
Une étude récente a révélé que parmi les porteurs de bactéries productrices de BLSE/CPE, près de la moitié des chats et des chiens ont été colonisés par au moins une souche multirésistante [2]. Certains antibiotiques, notamment les céphalosporines de 3e et 4e générations et les fluoroquinolones, sont considérés d'importance critique pour la santé humaine et ne doivent être utilisés en médecine vétérinaire qu'en dernier recours [6].
La lutte contre l'antibiorésistance nécessite donc une approche globale incluant l'Homme, les animaux et l'environnement, connue sous le nom d'"Une seule santé" (One Health) [7].
Données récentes sur l'exposition des chats et chiens aux antibiotiques
Les tendances d'utilisation des antibiotiques chez les animaux domestiques font l'objet d'un suivi attentif par les autorités sanitaires. Ces données permettent de mieux comprendre l'évolution du risque de résistance aux antibiotiques dans notre environnement proche.
Évolution de l'exposition depuis 2011
Le suivi de l'exposition des animaux aux agents antimicrobiens montre des variations significatives sur la dernière décennie. Si la consommation globale d'antibiotiques chez les animaux d'élevage a considérablement diminué, la situation est plus nuancée pour les animaux de compagnie. Entre 2011 et 2019, une baisse progressive a été observée chez les chats et les chiens, participant à l'effort collectif de réduction des antibiotiques. Cette tendance favorable s'explique notamment par la mise en œuvre du plan Écoantibio, lancé en 2012 pour promouvoir un usage plus raisonné des antibiotiques en médecine vétérinaire.
Augmentation de 5,1 % entre 2019 et 2020
Après plusieurs années de baisse, les experts ont noté un renversement préoccupant de tendance. Cette remontée s'est particulièrement manifestée dans certaines classes d'antibiotiques jugées critiques. Les pénicillines restent les antibiotiques les plus prescrits chez les animaux de compagnie, suivies par les céphalosporines et les fluoroquinolones. Ces deux dernières classes sont particulièrement surveillées car elles appartiennent aux antibiotiques d'importance critique pour la médecine humaine. Parallèlement, le marché des médicaments vétérinaires pour animaux de compagnie s'est développé, suggérant une médicalisation croissante des soins aux animaux domestiques.
Impact potentiel de la pandémie de Covid-19
Plusieurs facteurs liés à la crise sanitaire pourraient expliquer l'augmentation observée en 2020. D'abord, les mesures de confinement ont intensifié les interactions entre propriétaires et animaux, augmentant potentiellement l'attention portée à la santé des compagnons domestiques et les visites chez le vétérinaire. Ensuite, les difficultés d'accès aux soins vétérinaires pendant certaines périodes ont pu conduire à des prescriptions préventives d'antibiotiques. Enfin, l'adoption massive d'animaux de compagnie pendant les confinements a élargi la population féline et canine susceptible de recevoir des traitements. Cette hausse conjoncturelle nécessite néanmoins une vigilance particulière pour éviter qu'elle ne s'inscrive dans la durée, au risque d'amplifier le phénomène de résistance aux antibiotiques déjà observé.
Transmission des bactéries résistantes entre animaux et humains
L'interconnexion entre santé humaine et animale est désormais un fait établi dans le domaine de la résistance antibiotique. Les bactéries résistantes circulent constamment entre l'homme, l'animal et l'environnement, créant un cercle de transmission qui nécessite une approche globale.
Étude DYASPEO : 500 foyers analysés
Le projet DYASPEO (Dynamique de la propagation, de la persistance et de l'évolution de l'AMR entre l'Homme, les animaux et leur environnement) représente une avancée majeure dans la compréhension de ce phénomène. Coordonné par l'Anses, ce programme d'une durée de six ans analyse 500 chiens et les membres de leurs foyers [8]. Cette étude épidémiologique prévoit de collecter six prélèvements séquentiels de selles sur une période de 90 jours après le retour à domicile de chiens hospitalisés [9]. La première inclusion est prévue au printemps 2025 [9].
Rôle des céphalosporines et carbapénèmes
DYASPEO étudie spécifiquement la transmission de bactéries intestinales résistantes à deux types d'antibiotiques cruciaux : les céphalosporines à spectre étendu et les carbapénèmes [8]. Ces familles d'antibiotiques jouent un rôle particulier dans l'émergence de souches multirésistantes. Par ailleurs, les données d'épidémiosurveillance montrent que si la résistance aux carbapénèmes est parfois détectée chez les chiens et chats, elle résulterait généralement d'un contact avec des humains porteurs, ces antibiotiques n'étant pas utilisés en médecine vétérinaire [10].
Facteurs de risque de transmission
Plusieurs facteurs influencent la transmission des bactéries résistantes entre animaux et humains. Les contacts directs avec les animaux porteurs constituent un vecteur important [7]. Cette transmission peut également s'effectuer indirectement via l'environnement contaminé ou les aliments [10]. L'étude DYASPEO analyse notamment l'impact de l'hospitalisation du chien sur le microbiote animal et humain, ainsi que les interactions quotidiennes entre propriétaires et animaux [11]. Un questionnaire détaillé recueille des informations sur les caractéristiques du foyer, les habitudes de vie des membres et du chien, et leurs interactions [9].
La notion "Une seule santé" (One Health) prend ainsi tout son sens face à la résistance antibiotique, phénomène où humains et animaux partagent les mêmes menaces et nécessitent des solutions communes [12].
Prévenir l'antibiorésistance chez votre chien ou chat
Protéger son animal contre la résistance aux antibiotiques commence par des pratiques quotidiennes simples mais efficaces. La prévention reste l'approche la plus pertinente face à cette menace croissante pour nos animaux de compagnie.
Quand un chat ou un chien doit-il vraiment être sous antibiotique ?
Les antibiotiques ne doivent jamais être administrés sans prescription vétérinaire. Ils sont uniquement indiqués pour traiter les infections bactériennes confirmées, non pour les infections virales ou fongiques. Un diagnostic précis avant tout traitement antibiotique est essentiel. Par ailleurs, respecter scrupuleusement la posologie et la durée du traitement prescrit est fondamental pour éviter l'émergence de bactéries résistantes.
Importance de l'hygiène après contact
Se laver les mains après avoir caressé, nourri ou soigné son animal constitue une barrière efficace contre la transmission de bactéries potentiellement résistantes. Cette habitude simple limite considérablement la circulation des bactéries entre humains et animaux. Le nettoyage régulier des espaces de vie, des gamelles et des jouets de l'animal complète ces mesures d'hygiène essentielles.
Vaccination et conditions de vie
La vaccination préventive réduit les risques d'infections nécessitant un traitement antibiotique. Une alimentation équilibrée et des conditions de vie adaptées renforcent l'immunité naturelle de l'animal, le rendant moins vulnérable aux infections bactériennes.
Campagne « Les antibios, comme il faut, quand il faut »
Cette initiative nationale sensibilise les propriétaires et vétérinaires à l'usage raisonné des antibiotiques. Elle encourage le diagnostic précis avant prescription et promeut des alternatives thérapeutiques quand cela est possible. L'objectif principal reste de préserver l'efficacité des antibiotiques pour les situations où ils sont véritablement nécessaires.
Conclusion
La résistance aux antibiotiques chez nos animaux de compagnie représente un défi sanitaire majeur pour les années à venir. L'augmentation significative de l'utilisation des antibiotiques chez les chats et les chiens, particulièrement depuis 2019, souligne l'urgence d'adopter des pratiques plus responsables. Cette tendance inquiétante menace non seulement la santé de nos compagnons à quatre pattes, mais également celle des humains qui partagent leur quotidien.
La distinction entre animal porteur et animal malade demeure fondamentale dans cette problématique. Effectivement, un animal apparemment en bonne santé peut transmettre des bactéries résistantes pendant plusieurs mois sans présenter le moindre symptôme. Cette réalité complexifie considérablement la lutte contre l'antibiorésistance et justifie l'approche "Une seule santé" adoptée par les experts.
Le phénomène de multirésistance bactérienne, quant à lui, constitue un niveau d'alerte encore plus préoccupant. Les impasses thérapeutiques qui en résultent parfois laissent les vétérinaires et propriétaires démunis face à certaines infections. Des études comme DYASPEO apportent néanmoins des éclairages précieux sur les mécanismes de transmission entre humains et animaux.
Chaque propriétaire d'animal peut agir concrètement contre cette menace. Le respect strict des prescriptions vétérinaires, l'hygiène rigoureuse après contact avec l'animal, ainsi que la vaccination préventive forment un trio de mesures simples mais efficaces. Ces gestes quotidiens, associés à une prise de conscience collective, permettront de préserver l'efficacité des antibiotiques pour les générations futures.
L'antibiorésistance chez les animaux de compagnie n'est pas une fatalité. Les pratiques responsables des propriétaires, combinées aux avancées scientifiques et à la vigilance des vétérinaires, offrent des perspectives encourageantes pour contenir ce phénomène. Ensemble, humains et animaux pourront bénéficier plus longtemps de l'efficacité précieuse des traitements antibiotiques.
FAQ
Q1. Qu'est-ce que l'antibiorésistance chez les animaux de compagnie ? L'antibiorésistance est la capacité des bactéries à résister aux effets des antibiotiques, rendant ces médicaments inefficaces contre les infections. Ce phénomène touche autant les humains que les animaux de compagnie et peut rendre le traitement de certaines infections très difficile.
Q2. Comment savoir si mon chat ou mon chien a besoin d'antibiotiques ? Les antibiotiques ne doivent être administrés que sur prescription vétérinaire, après un diagnostic précis. Ils sont uniquement indiqués pour traiter les infections bactériennes confirmées, et non pour les infections virales ou fongiques. Il est essentiel de consulter un vétérinaire pour déterminer si un traitement antibiotique est nécessaire.
Q3. Comment puis-je prévenir l'antibiorésistance chez mon animal de compagnie ? Pour prévenir l'antibiorésistance, il est important de respecter scrupuleusement les prescriptions vétérinaires, de maintenir une bonne hygiène (se laver les mains après contact avec l'animal), d'assurer une vaccination préventive et de fournir une alimentation équilibrée. Ces mesures renforcent l'immunité naturelle de l'animal et réduisent le besoin d'antibiotiques.
Q4. Les animaux peuvent-ils transmettre des bactéries résistantes aux humains ? Oui, les bactéries résistantes peuvent circuler entre les animaux et les humains. Un animal peut être porteur de bactéries résistantes sans présenter de symptômes et les transmettre à son entourage. C'est pourquoi il est important de maintenir une bonne hygiène et de suivre les recommandations vétérinaires.
Q5. Existe-t-il des alternatives naturelles aux antibiotiques pour les animaux de compagnie ? Bien que certains produits naturels puissent avoir des propriétés antimicrobiennes, il est crucial de ne pas les utiliser sans l'avis d'un vétérinaire. Les alternatives aux antibiotiques doivent être évaluées au cas par cas, en fonction de l'état de santé de l'animal et du type d'infection. La prévention, à travers une bonne hygiène et une alimentation équilibrée, reste la meilleure approche pour maintenir la santé de votre animal.